Décrochez le 20/20 à l’oral du bac de français en révisant avec cette analyse linéaire de la scène 5 acte II de la pièce On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset  ! 

L’analyse présentée ici propose un cadre que vous pouvez suivre et reproduire lors de l’épreuve anticipée de français. Vous pouvez bien entendu modifier la problématique, ou certaines analyses à votre convenance.

Avant de commencer à lire cette analyse, n’hésitez pas à vous reporter à mon article “comment analyser un texte en français” et à ma “méthode de l’explication linéaire” pour mieux comprendre ma démarche.

NOTE IMPORTANTE : Cette analyse linéaire vous est proposée avec l’inestimable collaboration et le soutien précieux de ma collègue et amie : Fanny Berat-Esquier, Professeure agrégée de Lettres Modernes, auteur et Docteur en Littérature Française. Merci à toi, Fanny !

Introduction de l’analyse linéaire de la scène 5 de l’acte II d’On ne badine pas avec l’amour

Présentation de l’auteur

On ne badine pas avec l'amour Acte II scène 5

Alfred de Musset est l’un des principaux représentants du romantisme français, et en particulier de la génération désabusée née après la révolution de 1789 et déçue par celle de 1830.

C’est un écrivain qui oscille toute sa vie entre deux facettes : celle d’un écrivain brillant et travailleur, et celle d’un homme débauché et alcoolique.

Musset, c’est aussi l’homme passionné qui vécut une relation orageuse avec l’écrivaine George Sand pendant 2 ans, relation qui l’inspira par ses éclats et ses déceptions pour écrire On ne badine pas avec l’amour.

Mais pas trop vite, revenons quelques années en arrière pour mieux comprendre la genèse de cette œuvre.

Pour en savoir plus sur la vie d’Alfred de Musset, c’est par ici !

Phrase d’accroche

En 1830, au moment de la bataille d’Hernani et du scandale suscité par le renouvellement dramatique que propose le drame romantique, le jeune Alfred de Musset propose sa première pièce sur scène, La Nuit vénitienne.

C’est un échec cuisant qui le conduit à une décision radicale : il continuera d’écrire pour le théâtre mais publiera en revue et en volumes

C’est ainsi qu’en 1834 paraît la deuxième livraison du Théâtre dans un fauteuil qui contient On ne badine pas avec l’amour, pièce qui ne verra le jour sur scène qu’en 1861, après la mort de son auteur. 

Présentation du passage

La scène 5 de l’acte II donne à entendre un affrontement entre les deux jeunes héros. Camille, qui doit repartir au couvent, donne rendez-vous à Perdican près de la petite fontaine de leur enfance.

Elle lui annonce son intention de devenir religieuse et lui confie que les femmes qui l’entourent l’ont mise en garde contre la souffrance engendrée par l’amour.

Or Camille affirme : « Je veux aimer, mais je ne veux pas souffrir ; je veux aimer d’un amour éternel et faire des serments qui ne se violent pas. »

Perdican dénonce l’hypocrisie du discours des religieuses et affirme avec conviction sa foi en l’amour humain.   

Problématique

Nous nous demanderons en quoi Musset, à travers les deux tirades particulièrement éloquentes de Perdican qui clôturent cette longue scène, énonce sa conception romantique du sentiment comme seule vérité humaine.

Plan

Pour mener cette analyse linéaire de l’acte II scène 5 de la pièce On ne badine pas avec l’amour, nous suivrons les deux principaux mouvements du texte. 

  1. Dénonciation de l’hypocrisie des nonnes et du mensonge que constitue l’amour divin dans la première tirade de Perdican
  2. Célébration de l’amour imparfait des humains dans la seconde tirade de Perdican

Analyse Linéaire de l’acte II scène 5 de la pièce On ne badine pas avec l’amour : Texte

On ne badine pas avec l'amour Acte II scène 5

PERDICAN
Sais-tu ce que c’est que des nonnes, malheureuse fille ? Elles qui te représentent l’amour des hommes comme un mensonge, savent-elles qu’il y a pis encore, le mensonge de l’amour divin ? Savent-elles que c’est un crime qu’elles font, de venir chuchoter à une vierge des paroles de femme ? Ah ! comme elles t’ont fait la leçon ! Comme j’avais prévu tout cela quand tu t’ès arrêtée devant le portrait de notre vieille tante ! Tu voulais partir sans me serrer la main ; tu ne voulais revoir ni ce bois, ni cette pauvre petite fontaine qui nous regarde tout en larmes ; tu reniais les jours de ton enfance ; et le masque de plâtre que les nonnes t’ont plaqué sur les joues me refusait un baiser de frère ; mais ton cœur a battu ; il a oublié sa leçon, lui qui ne sait pas lire, et tu es revenue t’asseoir sur l’herbe où nous voilà. Eh bien ! Camille, ces femmes ont bien parlé ; elles t’ont mise dans le vrai chemin ; il pourra m’en coûter le bonheur de ma vie ; mais dis-leur cela de ma part : le ciel n’est pas pour elles.

CAMILLE
Ni pour moi, n’est-ce pas ?

PERDICAN
Adieu, Camille, retourne à ton couvent, et lorsqu’on te fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière ; et on se dit : “ J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui. 

Il sort.

On ne badine pas avec l’amour, acte II scène 5 : Analyse Linéaire

Analyse linéaire on ne badine pas avec l’amour acte II scène 5 : dénonciation de l’hypocrisie religieuse 

Perdican est en colère comme l’indique la réplique de Camille qui précède l’extrait : « Vous me faites peur ; la colère vous prend aussi. »

La ponctuation expressive présente dans sa tirade le montre. On dénombre en effet de nombreuses interrogations rhétoriques, destinées à impliquer Camille au maximum et des exclamations

Il se place dans une position de domination en appelant sa cousine « malheureuse fille » et en lui demandant : « Sais-tu ce que c’est que des nonnes ? », ce qui implique que lui le sait et qu’il peut lui révéler une vérité. La répétition du verbe « savoir » est significative de cet enjeu. 

Le discours des nonnes, qui a été développé par Camille dans la première partie de la scène, est résumé par Perdican : il s’agit de « représenter l’amour des hommes comme un mensonge ». Or, grâce à un parallélisme de construction, il dénonce « qu’il y a pis encore » : « le mensonge de l’amour divin ». 

Il dénonce ensuite ce qu’il qualifie de « crime » : « chuchoter à une vierge des paroles de femme », se plaçant ainsi sur le terrain moral qui est celui de la religion.

Il réactive la thèse précédemment développée que les religieuses le sont très souvent par dépit amoureux et qu’elles conseillent à Camille de faire précisément ce qu’elles n’ont pas fait. 

Deux exclamations montrent qu’il est scandalisé : « Ah ! comme elles t’ont fait la leçon ! ». Il dénonce ici un véritable lavage de cerveau subi par sa cousine. 

L’autre exclamation renvoie à un épisode de la scène 2 de l’acte I où Camille s’était « arrêtée devant le portrait de [leur] vieille tante ». Cette attitude avait en quelque sorte scellé la mésentente des deux jeunes gens que le Baron voulait à tout prix unir. 

Une longue phrase très éloquente poursuit la tirade : le « tu » de Camille est opposé à « son cœur » : la jeune fille serait d’après Perdican scindée entre les discours appris et ce que lui dicteraient ses émotions. 

La 1ère partie de la phrase renvoie à la Camille influencée par les nonnes. Des phrases négatives, lexicalement ou syntaxiquement, manifestent la volonté de supprimer le passé et le lien avec Perdican, de renier l’enfance et le monde naturel qui la représente : « le bois », « la fontaine ». 

Perdican cherche aussi à toucher Camille en personnifiant « la pauvre petite fontaine qui nous regarde tout en larmes » : il recourt ici à une image lyrique

Ce monde authentique est rejeté par Camille car les nonnes lui « ont plaqué sur les joues » un « masque de plâtre » : cette métaphore renvoie autant à la comédie qu’à la mort. Le discours des religieuses est donc une nouvelle fois accusé d’être hypocrite et mortifère. 

La 2e partie de la période débute au « mais » qui oppose un mouvement de révolte du « cœur » de Camille. Celui-ci « a battu, il a oublié sa leçon », celle délivrée par les bonnes sœurs. Le cœur « ne sait pas lire », ce qui lui confère une spontanéité qui a guidé la jeune fille « sur l’herbe où nous voilà ».

Un thème récurrent de la pièce est activé ici : l’opposition entre nature et culture. 

Perdican clôt sa tirade sur un ton ironique : « Ces femmes ont bien parlé ; elles t’ont mises dans le vrai chemin. » Évidemment Perdican pense tout le contraire et tire les conséquences hyperboliques de cette influence délétère subie par sa cousine : « il pourra m’en coûter le bonheur de ma vie ».

C’est un aveu d’amour indirect. 

Mais la colère l’emporte dans le message final à transmettre aux religieuses : « mais dis-leur cela de ma part : le ciel n’est pas pour elles ». Perdican se place en position de juge puisqu’il annonce la punition de l’hypocrisie. 

Camille semble impressionnée par la tirade de son cousin et lui demande si elle sera punie aussi : « Ni pour moi, n’est-ce pas ? » 

Analyse linéaire on ne badine pas avec l’amour acte II scène 5 : célébration de l’amour humain 

La 2e tirade de Perdican est à nouveau très éloquente. Le jeune héros y démontre sa haute maîtrise du verbe. 

Sa position de supériorité vis-à-vis de Camille se poursuit puisqu’il emploie deux impératifs : l’un pour la renvoyer au couvent (« retourne ») et l’autre pour lui dicter le discours qu’elle devra tenir à ses consoeurs (« réponds ce que je vais te dire »).

Perdican est presque le seul à parler dans cette fin de scène, ce qu’on peut interpréter comme une prise de parti de l’auteur qui lui confie sa propre vision des choses. 

Les propos qu’il lui tient d’abord sont destinés à répondre aux « récits hideux » des religieuses, qui ont « empoisonné » Camille selon lui. Sa colère se perçoit dans le choix de termes péjoratifs très marqués. 

Le discours à transmettre commence à « Tous les hommes »… et consiste en un portrait particulièrement pessimiste et sans espoir de l’humanité toute entière, où hommes et femmes sont renvoyés dos à dos pour leur fausseté, vanité et débauche par le biais d’accumulations hyperboliques :

« Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux et lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; » 

Ces défauts moraux énumérés des deux sexes conduisent naturellement à une image très péjorative du monde dans sa totalité, énoncée par une métaphore restrictive : « le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange » : animalité et boue morale définissent le genre humain avec un excès qui résonne peut-être de manière ironique.

Musset souscrit-il à ces propos désespérés ou singe-t-il les jugements les plus noirs des moralistes ?

Ce début de discours résonne comme une concession à la vision sévère du monde de Camille et pourrait sembler lui donner raison si un « mais » adversatif ne renversait l’orientation des propos. 

Une tournure emphatique met en relief « une chose sainte et sublime », renforcée par l’allitération en [s] : « l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. » Perdican se livre alors à une célébration de l’amour humain dans toute son imperfection, comme le marque l’emploi des adverbes d’intensité

L’amour est associé à la souffrance, comme l’avait déploré Camille précédemment dans la scène : « On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ».

Le discours est généralisant grâce à l’emploi du pronom impersonnel, du présent de vérité générale et de l’anaphore de l’adverbe de temps « souvent ». 

Le rythme ternaire énonçant les souffrances liées à l’amour s’oppose à la simplicité du sentiment : « mais on aime » qui semble à elle seule une justification. 

Une mise en scène des derniers moments de la vie d’un homme fait de l’amour le sens de l’existence.  

Le passage du « on » au « je » est notable : « et on se dit : J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois ; mais j’ai aimé. » Le lyrisme reprend ses droits, d’autant plus que ces formules sont empruntées à une lettre de George Sand adressée à Musset, qui donne à la tirade de Perdican une dimension autobiographique

On peut parler de conception romantique de l’amour dans le sens où aimer revient à exprimer le plus pleinement sa vérité. Les émotions et les sentiments, avec leur lot de souffrances, sont authentiques et s’opposent à l’« être factice créé par [l’] orgueil et [l’]ennui. »

C’est bien l’orgueil qui perdra les jeunes héros dans cette pièce dont le genre (« Proverbe ») dit bien la dimension moralisante. 

Conclusion de l’analyse linéaire de l’acte II scène 5 de la pièce On ne badine pas avec l’amour

Rappel du développement

La fin de la scène 5 de l’acte II, scène de confrontation entre Perdican et Camille, donne à entendre deux tirades successives de Perdican. Sa colère le pousse à dénoncer l’hypocrisie des religieuses sur un ton polémique puis à adopter une tonalité plus lyrique pour célébrer l’amour humain dans toute son imperfection. 

Réponse à la problématique

On se posait la question suivante : En quoi Musset, à travers les deux tirades particulièrement éloquentes de Perdican qui clôturent cette longue scène, énonce-t-il sa conception romantique du sentiment comme seule vérité humaine ? 

Pour répondre à cette question, on peut souligner que Musset donne la parole au héros masculin de la pièce dont il fait son porte-parole.

La thématique de l’hypocrisie a été présente tout au long de la scène mais dans les deux tirades de Perdican, elle est centrale : il la dénonce d’abord comme un « masque de plâtre » mortifère qui empoisonne avant de fournir l’antidote : l’amour.

Seuls les sentiments et les souffrances permettent à l’humain d’exprimer sa vérité. 

Ouverture

Perdican aura l’occasion de faire entendre son lyrisme amoureux dans la scène 3 de l’acte III lorsqu’il se déclarera à Rosette, l’anti-Camille. À ce titre, on peut rapprocher les deux scènes. 

Mais toute la complexité de ce personnage romantique repose dans un orgueil qu’il dénonce sans en être exempt et qui le conduira vers la catastrophe car « on ne badine pas avec l’amour » … 

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